Certaines personnes ont le « pardon » facile. Elles reconnaissent leurs torts, parfois avec beaucoup d’émotion, mais finissent par répéter les mêmes comportements. Cette dynamique, souvent frustrante pour l’entourage, soulève une question : pourquoi certaines excuses semblent sincères… mais n’entraînent aucun véritable changement ?

L’excuse comme stratégie relationnelle, pas comme engagement

En psychologie sociale, on distingue l’excuse réparatrice de l’excuse stratégique.

  • Excuse réparatrice : elle s’accompagne d’une réelle introspection, d’une volonté de modifier ses attitudes et de prévenir la répétition.
  • Excuse stratégique : elle sert principalement à désamorcer un conflit immédiat, éviter des sanctions ou regagner l’approbation de l’autre, sans réel travail sur soi.

Dans le second cas, le « pardon » devient un outil de gestion sociale plutôt qu’un acte de transformation personnelle.

Les mécanismes psychologiques en jeu

  1. Évitement de la dissonance cognitive
    Selon la théorie de Festinger, l’être humain cherche à réduire l’inconfort lié à l’écart entre ses actes et ses valeurs. Une excuse rapide permet de restaurer une image positive de soi… sans forcément modifier le comportement en profondeur.
  2. Manque de conscience émotionnelle
    Certaines personnes identifient mal les déclencheurs internes qui les poussent à agir de façon nuisible. Elles « réparent » en surface, mais sans travail d’auto-observation, le cycle se répète.
  3. Renforcement social
    Si l’entourage accepte systématiquement les excuses, cela peut renforcer le schéma : l’individu comprend qu’il peut transgresser, s’excuser, et que la relation reviendra à la normale, sans conséquences durables.
  4. Faible tolérance à la culpabilité
    Chez certains, la culpabilité est vécue comme insupportable. Dire « pardon » agit comme un analgésique émotionnel immédiat, mais ne conduit pas à un changement structurel.

Pourquoi le changement réel est si rare

Changer un comportement nécessite :

  • Prendre conscience des déclencheurs et schémas internes.
  • Développer des compétences de régulation émotionnelle et comportementale.
  • S’engager dans des actions concrètes qui modifient la manière d’agir dans des situations similaires.

Sans ces étapes, l’excuse devient un acte isolé, non relié à un processus d’apprentissage.

Les conséquences sur les relations

  • Érosion de la confiance : lorsque les promesses implicites contenues dans l’excuse ne sont pas tenues, la crédibilité s’effondre.
  • Cercle vicieux de ressentiment : la personne blessée accepte peut-être les excuses au début, mais accumule colère et amertume avec chaque répétition.
  • Relation asymétrique : celui qui s’excuse maintient un certain contrôle, car il choisit quand et comment réparer, sans réellement céder de pouvoir.

Les pistes pour rompre le cycle

  1. Passer de l’excuse à l’engagement
    Associer chaque pardon à une action concrète (changer une habitude, consulter un thérapeute, mettre en place un plan personnel).
  2. Instaurer un retour d’expérience
    Revenir avec la personne lésée après un temps donné pour montrer ce qui a changé.
  3. Accepter la responsabilité continue
    Comprendre que réparer un tort ne se limite pas au moment de l’excuse, mais implique un suivi et une constance.
  4. Thérapie et introspection
    Un accompagnement psychologique peut aider à identifier les causes profondes : immaturité émotionnelle, impulsivité, schémas relationnels hérités de l’enfance.

💡 En résumé : S’excuser facilement mais répéter ses erreurs traduit souvent un manque de travail introspectif et une tendance à utiliser l’excuse comme régulateur social rapide. Pour que le « pardon » ait un véritable impact, il doit s’accompagner d’une transformation concrète, visible et durable, autant pour le bien-être personnel que pour la santé de la relation.