Dire « Je suis désolé » semble simple. Deux mots seulement. Pourtant, pour beaucoup, ils restent bloqués dans la gorge. Pourquoi ? Parce que l’excuse est perçue comme une marque de faiblesse, une admission de faute, une exposition à la vulnérabilité. Mais lorsqu’elle est authentique, elle peut devenir un levier puissant de guérison émotionnelle et relationnelle.
L’art difficile de s’excuser
Une étude publiée en 2016 dans la revue Emotion (Howell, Turowski & Buro) montre que ceux qui s’excusent facilement présentent davantage d’empathie et de conscience de soi. À l’inverse, ceux qui évitent les excuses craignent souvent de perdre le contrôle, de paraître faibles ou de ternir leur image personnelle.
S’excuser ne se résume pas à un mot : c’est un acte social complexe qui implique :
- Reconnaître sa faute
- Valider la douleur de l’autre
- Montrer sa volonté de réparer
Les excuses qui font plus de mal que de bien
Certaines formules, comme le fameux « Désolé si tu t’es senti blessé », déplacent la responsabilité vers la personne qui souffre. C’est comme dire : « Je n’ai rien fait de mal, mais si tu l’as mal interprété, tant pis pour toi. »
Des recherches de l’université de Toronto (Prof. Jennifer Thompson) ont montré qu’une excuse perçue comme non authentique peut aggraver la blessure au lieu de l’apaiser.
Le pardon, un remède psychologique… et parfois physique
Le pardon – qu’il soit adressé aux autres ou à soi-même – a aussi des bénéfices sur la santé. Une étude de l’Université de Miami (Toussaint et al., 2012) a constaté que les personnes qui s’excusent et vivent le pardon présentent moins de stress, d’anxiété et de dépression, ainsi que moins de symptômes physiques comme les maux de tête ou les troubles du sommeil.
Le modèle REACH pour apprendre à pardonner
Le psychologue Everett Worthington, qui a consacré sa carrière à l’étude du pardon après l’assassinat de son frère, a développé la méthode REACH :
- R – Recall the hurt (Se rappeler la blessure) : reconnaître la douleur et les faits, sans minimiser ni fuir.
- E – Empathize with the offender (Éprouver de l’empathie pour l’auteur) : voir la personne dans sa complexité, comprendre ses motivations sans forcément les justifier.
- A – Altruistic gift of forgiveness (Offrir le pardon comme un cadeau) : libérer son cœur du poids de la colère, pour soi-même avant tout.
- C – Commit to forgive (S’engager à pardonner) : prendre une décision consciente, parfois ritualisée, qui ancre l’acte de pardon.
- H – Hold on to forgiveness (Maintenir le pardon) : gérer les rechutes émotionnelles et réaffirmer son choix de pardonner.
Pourquoi est-ce si difficile ?
Nous aimons nous voir comme des « gens bien » ; admettre une erreur menace cette image. Il y a aussi la peur de la réaction de l’autre : et s’il ne pardonnait pas ? Ou pire, s’il utilisait notre excuse contre nous ? Enfin, dans les relations de couple ou parent-enfant, le pardon est souvent perçu comme un renoncement au pouvoir.
Ne pas oublier de se pardonner à soi-même
Le pardon ne concerne pas seulement les autres : il est essentiel aussi envers soi-même. Sans cela, la culpabilité et le regret peuvent alimenter l’auto-critique, la dépression et l’isolement. En psychologie positive, le pardon de soi est vu comme un acte de croissance personnelle : non pas effacer le passé, mais en tirer des leçons pour avancer.
💡 En résumé : Pardonner ou s’excuser n’efface pas ce qui s’est passé. Mais c’est un choix libérateur qui ouvre la voie à un futur apaisé, en rétablissant les liens et en renforçant notre propre bien-être émotionnel et physique.






