Le 7 octobre restera, pour Yated comme pour toute la région d’Eshkol, une journée où l’État d’Israël a frôlé l’indicible. Selon l’enquête exhaustive dévoilée par Tsahal, le moshav a échappé à un massacre certain grâce à la résistance acharnée de sa garde civile et à un combat d’une violence extrême mené sur la route 232, baptisée depuis “route du sang”.
Dix terroristes infiltrés ont été capturés vivants à l’intérieur même du moshav. Vingt autres, en route pour commettre un carnage, ont été éliminés dans un affrontement dirigé par le commandant de la brigade Paran. Un seul nom s’ajoute à la liste des héros tombés : le capitaine de réserve Yiftah Gorny, mort en empêchant les terroristes de s’emparer de véhicules militaires.


Les conclusions de l’enquête, présentées aux familles endeuillées et aux habitants, sont sans ambiguïté : “Tsahal a échoué dans sa mission de protéger Yated”, reconnaît le rapport.
Mais le même document insiste immédiatement sur un autre fait, indéniable et salvateur : sans la réaction immédiate, disciplinée et déterminée de la garde civile locale, le moshav aurait été le théâtre d’une boucherie comparable à celles de Be’eri, Nir Oz ou Kfar Aza.

La journée du 7 octobre à Yated, restituée par une année de travail, d’interviews, de vidéos de sécurité, de messages radio et de témoignages directs, dessine un scénario où une poignée de civils armés, épaulés par quelques unités arrivées tardivement, ont empêché l’irréparable.


6h29 – L’attaque commence : alerte et mobilisation

Lorsque les salves de roquettes du Hamas déclenchent l’offensive, la réaction du responsable sécuritaire du moshav est immédiate :
fermeture des portes, ouverture des abris, déploiement des équipes d’intervention, début des patrouilles.

Le moshav n’attend pas l’armée. Il agit.
Et c’est précisément ce réflexe, devenu vital après des années d’abandons politiques, qui sauvera des dizaines de familles.


9h15 – Premier terroriste capturé

Lors d’une patrouille, la garde identifie un terroriste derrière la clôture.
Nerveux mais désorienté, il se rend.
Il est placé sous la surveillance d’un habitant armé.
À ce moment-là, personne ne sait encore qu’il s’agit du premier d’une longue série.


9h30 – Les premières intrusions

Un deuxième terroriste tente de pénétrer dans une maison.
La garde arrive en trois véhicules, ouvre le feu, le poursuit dans les buissons.
Un autre groupe repère un troisième individu, qui s’était faufilé sous le portail ouest.
Une manœuvre d’encerclement est exécutée : l’un des volontaires le touche, l’immobilise et l’arrête.

En moins de deux heures, cinq terroristes sont capturés vivants.
Un exploit en situation de chaos absolu.


Pendant ce temps, sur la route 232 : la bataille qui a tout changé

À 09h40, une scène d’une intensité rarement documentée se déroule à quelques centaines de mètres du moshav.
Le commandant de la brigade Paran repère un convoi suspect.
Il tire en l’air, pour s’assurer qu’il ne s’agit pas de soldats israéliens.
La réponse vient immédiatement : rafales automatiques.

Le combat commence.

Le rapport détaille une lutte acharnée :
– 20 combattants israéliens contre plusieurs dizaines de terroristes,
– tirs croisés depuis les deux côtés de la route,
– unités du Lotar prises à partie,
– un commandement brouillé et sous-équipé,
– un hélicoptère d’attaque qui mettra 40 minutes à arriver.

Au cœur de ce chaos, le capitaine (réserve) Yiftah Gorny, officier du Lotar, protège le poste de commandement.
Il traverse plusieurs fois sous le feu pour empêcher les terroristes de s’emparer de véhicules militaires.
Lors d’un déplacement, il est atteint et s’effondre.

Son sacrifice sauve des dizaines de vies.

À 10h05, un tank du bataillon Caracal arrive enfin et élimine 20 terroristes en quelques minutes.
La route est dégagée. Le moshav est sauvé.
Si ce convoi avait atteint Yated, l’histoire aurait été tout autre.


La deuxième vague – 8 octobre

Alors que le moshav croit la menace écartée, une alerte tombe dans la nuit : des terroristes pourraient revenir.
À 06h10, une brèche est détectée dans la clôture.
Des soldats de l’unité “Nitz” arrivent et débutent des recherches.
La brèche confirme une nouvelle infiltration.

À 10h20, un habitant qui inspecte les champs découvre cinq terroristes allongés au sol, mains en l’air.
Ils sont menottés et regroupés en attendant leur transfert.

Le moshav sera évacué à 13h00.


Un rapport accablant, mais un héroïsme incontestable

L’enquête conclut :

– Tsahal a failli.
– La chaîne de commandement, du niveau compagnie au niveau brigade sud, s’est effondrée dans les premières heures.
– Les renforts de la division 80 ont été retardés par des combats en route.
– Les communications étaient fragmentées, rendant difficile la coordination de la défense.

Mais le rapport souligne aussi :

la garde civile de Yated a rempli sa mission avec une efficacité exceptionnelle,
des citoyens ont empêché un massacre,
le combat de la route 232 a changé le destin de tout un moshav,
la ténacité de civils et de réservistes a compensé l’effondrement militaire initial.

Ce récit est celui d’un 7 octobre où l’État n’a pas protégé ses citoyens — mais où ses citoyens ont protégé l’État.

Un rappel brutal, encore aujourd’hui, que l’ennemi n’a pas seulement voulu abattre Israël : il a voulu détruire des familles, écraser des villages, transformer Yated en un nouveau Be’eri.

Et que seule la résistance locale, issue des tripes d’Israël, a empêché que cette page historique soit encore plus noire.